Le grand passage
Il a déjoué tous les pronostics, des médecins comme des voyantes, pour s’éteindre à 96 ans.
Ces dernières années ont été pour moi l’occasion de plonger dans une réflexion (réflection ?) sur ce qu’on appelle aujourd’hui la mort.
Evidemment, il y a une part de tristesse dans la mort. Comme me l’a soufflé un jour un ami qui venait d'apprendre un décès : « c’est une façon unique d’aimer qui disparaît de ce plan de réalité ».
La mort est un mystère, c’est à la fois la peur de l’inconnu et celle de lâcher le connu.
Aujourd’hui en Occident, dans ma culture "moderne", le paradigme prépondérant est que la mort est une fin. Nous sommes évidemment imbibés des mythes religieux chrétiens mais la vision décrite a du mal à résonner dans nos consciences d’aujourd’hui.
Je suis déjà mort. C’était en 2016.
J’en ai fait l’expérience dans une session de chamanisme. Une expérience très difficile à relater par des mots et des concepts, mais c’était…. grandiose. Je me rappelle avoir ri aux éclats devant la Cosmic Joke, la prépondérance absolue qu’on donne à notre vision étriquée de la réalité.
La métaphore la plus facile à représenter, c'est peut-être celle du passage de la chenille au papillon.
Ce qui pour la chenille est une fin est en réalité un passage vers une dimension d’expérience a priori insoupçonnable.
Laurent, un chaman de la FSS que j’aime particulièrement, relatait que dans ses stages d’exploration de la mort, sa difficulté c’était parfois de faire revenir certains participants qui se plaisaient à vouloir rester dans cet autre plan de réalité.
C'est que l'expérience est pour le moins enrichissante.
On en ressort toujours chenille, mais une chenille différente. Une chenille qui a goûté au papillon. Une chenille qui a toujours envie de vivre sa vie de chenille mais qui redoute moins le grand passage.
Dans les années à venir, je pense que notre rapport à la mort va changer.
Les larmes couleront toujours, mais elles couleront aussi de joie.
En attendant, il paraît qu'on ne dit jamais assez aux gens qu’on aime qu’on les aime, donc :
Je vous aime.
Je t’aime papa.
Clément, 26 mars 2022, Ere commune.